Maintenant que la Chandeleur est passée, vous vous demandez ce que vous allez bien pouvoir faire du paquet de farine de sarrasin entamé qui traine dans votre placard ?
J’ai ce qu’il vous faut ! Une vieille recette normande, pas vraiment connue en dehors de la Basse-Normandie, j’ai nommé, la bouillie de sarrasin.
J’espère que le mot « bouillie » ne vous fait pas peur : associée dans l’imaginaire moderne des Français aux nourritures de l’enfance, les anthropologues pensent qu’il s’agit en fait d’une des plus vieilles recettes de cuisine de l’humanité, préparée depuis le Néolithique.
La polenta, tellement à la mode actuellement, n’est rien d’autre qu’une bouillie, dont elle a gardé l’étymologie latine puls.
Foufou d’Afrique équatoriale, polenta italienne ou bouillie de sarrasin, toutes ces préparations sont toujours consommées quotidiennement par des centaines de milliers de personnes dans le monde, et sont identiques dans leur préparation : on mélange une farine à un liquide, eau ou lait et on fait épaissir le tout sur une source de chaleur, en remuant constamment, jusqu’à obtenir la consistance désirée.
Revenons à la Normandie, que je vous explique ce que le sarrasin est venu faire dans notre cuisine. La Basse-Normandie a longtemps été une terre de culture du sarrasin et ce depuis le 15e siècle et au moins jusqu’au 19e siècle. Nourriture du pauvre, nourriture paysanne, le sarrasin, mangé sous forme de bouillie ou de galettes a longtemps assuré la pitance du paysan normand. On associe le sarrasin à la Bretagne, mais oh ! Surprise ! Quand on se penche sur les sources historiques, on apprend que la première mention qui en est faite, en 1460, concerne la ville d’Avranches. Vous comprenez maintenant pourquoi la bouillie de sarrasin est consommée en Normandie ?
Quand j’étais enfant, souvent, mes camarades de classe me disaient avoir mangé de la bouillie la veille au soir. Ce n’est pas mon cas, je n’ai pas le souvenir d’en avoir jamais mangé, mais quand j’ai interrogé ma mère, elle m’a expliqué que ma grand-mère en faisait, qu’elle moulait la bouillie dans un bol, puis une fois refroidie, elle la découpait en tranches, qu’elle faisait dorer à la poêle.
Un de mes collègues, d’origine normande également, m’a dit que sa mère en faisait souvent le soir. Je ne sais pas pourquoi, mais c’est un aliment du soir, pas de la journée !
La recette ci-dessous m’a été donnée par une voisine de ma grand-mère, originaire de la Manche. J’ai pris la peine de peser et mesurer les ingrédients pour une personne, à vous de multiplier les proportions en fonction du nombre de convives.
Si vous n’avez jamais mangé de bouillie de sarrasin, sachez que le goût est très doux et que ça se mange salé. La bouillie, ça cale, et un bol suffit pour un repas complet. C’est aussi un plat qui a l’avantage d’être très vite fait, donc très pratique quand on est pressé et qu’on ne sait pas quoi faire à manger.
Prenez la peine de prendre du lait entier, cru, pasteurisé ou microfiltré mais surtout pas du lait en brik stérilisé et demi-écrémé, votre bouillie ne serait pas bonne. Pour le beurre, c’est pareil : salé et de bonne qualité.
Pour 1 bol (une personne)
Ingrédients
30 g de farine de sarrasin
250 ml de lait entier
10 g de beurre demi-sel
Sel, poivre
Réalisation
Verser la farine de sarrasin dans une casserole, délayer progressivement avec le lait. Saler et mettre à cuire à feu fort, en remuant continuellement, jusqu’à ce que la bouillie épaississe. Poivrer, mélanger, et verser dans les bols. Ajouter un morceau de beurre demi-sel et servir immédiatement.
Ah, là, tu touches une corde sensible: c’est ce que ma grand-mère me préparait parfois comme repas du soir: c’est de la vraie comfort food pour moi! En plus du beurre, j’y mets souvent de la confiture 😉
Chez nous, ça se mange plutôt salé, mais tu as raison c’est de la comfort food 🙂
Merveilleux souvenir… Exactement comme ma grand-mère la faisait, et ce n’était pas très loin d’Avranches !!!
Oh ! Surprise ! Mais merci pour cet éclairage.
C’est vrai que je n’ai jamais vu cette version en Bretagne.
Je ne connaissais pas du tout cette recette. Je me demande ce que cela doit donner. Vu que j’adore le sarrasin, j’en suis sûre que j’aimerais.
Merci pour ce partage, je t’embrasse. Belle journée <3
Gérard, contente de te rappeler des souvenirs.
Patrick, il y a sûrement d’autres endroits où ça se fait, mais en Basse-Normandie, c’est la cuisine paysanne, j’imagine de pauvres au départ. Mon oncle m’a dit que dans l’Orne, ils appellent ça des « poissons », je ne sais pas pourquoi 🙂
Miss Pat’ le goût est très doux, servi bien chaud, c’est le repas idéal pour un soir d’hiver.
Dans la région de Cherbourg, on verse dans une assiette au lieu d’un bol, on laisse prendre, et ensuite, on fait dorer à la poêle…
Quand j’avais 10 ans j’habitais Isigny sur mer et je retardais souvent mon retour à la maison après l’école, à 16 h 30, pour rester un peu avec ceux qui allaient à l’étude et qui avaient leur goûter, le plus souvent de la bouillie de sarrazin que j’adorais et que ma mère ne préparait pas (on devait être trop bourgeois pour ça !). Quel régal et après que d’explications à fournir au dîner pour expliquer mon manque d’appétit !!!
Ce soir j’en ai mangé et quel régal!!
La « vraie » madeleine de Proust…Ma mère en faisait, (souvent en hiver) ou en achetait une assiette à la boulangerie rue au Blé de Cherbourg et le soir on se régalait.
Dorée à la poêle dans un peu de beurre salé et servie avec un peu de sucre en poudre, un délice!
Meme souvenir de cette bouillie achetee rue au blé et meme façon de la manger!!! Que de souvenirs….
Depuis, j’ai demenage et cherche la recette….
Merci du partage
Delphine et Françoise, je suis bien contente de vous rappeler de jolis souvenirs.
Que de souvenirs… Autrefois, à Bolleville en Cotentin, on la mangėait chaude dans le plat et ce qui restait on le passait a la poele avec du beurre demi-sel. Ce plat est une ecette purement normande, quant au sarrazin, ce n’est pas un produit breton, la premiere fois qu’on parle de sa culture, c’est a Avranches au XIVeme siecle, ensuite cette cereale fut utilisee dans toutes les familles pauvres de France, avant de devenir un produit de luxe que l’on fait venir principalement de Chine…
Ha ha ha (rire car je songe à la vieille rivalité -souvent « pour rire » – entre Bretons et Normands). On connait bien en Bretagne cette « bouillie » (que nous appelons « yod » en breton), et nous la faisons aussi avec de l’avoine : on prend une boîte du fameux porridge du monsieur avec son chapeau – ceci pour ne pas citer la marque – , on en fait une bouillie épaisse, on la coule dans un plat rectangulaire ou barquette, on la laisse refroidir et on la coupe en tranches, tranches qu’on va mettre à rissoler dans du beurre (breton bien sûr, et donc demi-sel par nature. ha ha ha)
Divin, aussi bien au sarrasin qu’à l’avoine.
Pour les fans de sarrasin, je recommande les livres de Bleuzen du Pontavice, et, plus discutable car truffé de fautes de français (vraiment du délire, à ce point, et pourtant la dernière page remercie… les correcteurs !!!) « Vive le blé noir », d’Eric Jubin.
Ma grand mère originaire de la Haye du puits nous faisait souvent de la bouillie de sarrasin que l’on appelait « Bouillie grise » quel régal…je viens d’en trouver toute faite presentée sous vide sur le marché dans la manche…mais rien à voir avec celle de mémère, grâce à vous j’essayerai d’en faire.
Trop bon…
ma grand mère de rennes m en faisait elle appelait ça les groues et mon grands père le lendemain en petit cube dans du beurre …mais du beurre bien 100gr ;;moi de temps en temps je me tape une assiette avec mon petit volcan de beurre salèe j adore ça et je compte bien en faire à mes petits enfants
Merci, je suis très heureuse de découvrir cette recette. Ma probablement future belle-fille nous en promet depuis un moment parce que sa grand mère lui en fait souvent. Je vais lui faire la pige et lui en présenter un jour. Elle me dira si ça se rapproche de la recette de sa grand mère. Je vais m’entraîner dès ce soir – et j’ai hâte d’y être !
Merci à tous pour vos commentaire, ça me touche de voir à quel point cette vieille recette normande éveille vos souvenirs et envies 🙂
merci pour la recette, j’avais envie d’en faire depuis longtemps mais je n’avais pas les quantités pour la réussir. Effectivement, lorsque j »étais enfant, c’était aussi un repas du soir et j’adorais ça
Depuis le temps que je cherchais cette recette. Merci infiniment. Je suis à Lyon depuis 30 ans mais suis originaire de Flers en Basse-Normandie. Ma grand-mère paternelle en faisait une fois par semaine quand j’étais petite, et je me régalais pendant les vacances. Ma grand mère maternelle ne m’en a jamais fait, je confirme que cela se faisait dans la classe ouvrière ou paysanne. On la mangeait aussitôt faite avec du beurre mais j’avais le souvenir qu’il fallait des muscles pour tourner la mouvette (cuillère en bois). Le reste, on le mettait dans un plat à refroidir, et on le mangeait le lendemain coupé en tranches fines passées dans une poêle avec du bon beurre salé évidemment, là, c’était vraiment divin…. Que de bons souvenirs tu réveilles. Merci pour ce partage. Régine.
heureux d’avoir retrouvé cette recette ,le souvenir en temps apprenti boulanger ( 1958/59),nourri logé par mon employeur a LIVAROT dans le CALVADOS,cette bouillie était le plat du soir et j’adoré ,a moi de retrouver une bonne farine bio et la faire connaitre a mes proches
Contente de vous faire plaisir 🙂 On trouve assez facilement de la farine de sarrasin dans les magasins bio. La mienne est bio d’ailleurs…
Merci beaucoup pour cette recette, elle me rappelle aussi de bons souvenirs en famille.Je vais la faire gouter à mes enfants .
Trop bon !!!!!! A60 ans on a retrouvés nos 10 ans!!!!!!!!
MERCI BEAUCOUP POUR TOUTES CES TRACES ECRITES
DE LA RECETTE DE BOUILLIE DE SARRAZIN
JE LA CUISINE CE SOIR POUR CE 1ER JOUR DE GEL DANS LE CALVADOS.
C’EST LA RECETTE DE MA GRAND MERE MATERNELLE ET DE MA MERE
la boulangerie de la poste de Valognes (manche) en vend.
j’en ai trouvé dans le magasin « goût et qualité » de Breteville sur Odon Calvados
bonjour, moi je suis de Cherbourg et très souvent quand je parle de cette recette, les gens me regardent avec des grands yeux, ils ne connaissent pas… je suis contente de voir que d’autres partage ce même souvenir de la bouillie faite par leur grand-mère! ma mère avait elle aussi appris à la faire, et j’en fais moi même à mes enfants maintenant, tout le monde se régale! 🙂
ici nous la mangeons en « volcan’ avec le beurre dans le cratère comme on disait enfant. et ce qu’il reste, repose dans une assiette jusqu’au lendemain, puis on le passe à la poêle après l’avoir coupée en tranche et on la mange saupoudrer de sucre! un régal…
et pour la petite histoire, ma grand-mère racontait qu’enfant, sa grand-mère mettait la marmitte dans la cheminée pour faire la bouillie, et une fois qu’elle était prête, elle mettait un gros morceau de beurre et tout le monde mangeait dans la marmitte!
Chez nous, dans la region de Tourlaville dans la Manche, on l’appellait La bouille chute deux coups, C’est a dire la bouillie cuite deux fois.
Delicieux coupee en tranche, trempee dans la farine et rissolee a la poele…